Le 26 août 1942
PC/SE
Préfecture de la Gironde
Secrétariat Général
Section : Questions Juives
Le Préfet Régional, Préfet de la Gironde
à M. le Chef du Gouvernement Ministre,
Secrétaire d’Etat à l’Intérieur
(Délégation du Ministère de l’Intérieur)
(sous couvert de M. Leguay, Représentant du
Secrétaire Général pour la Police)
Comme suite à ma lettre du 22 août 1942, concernant le transfert au camp de Drancy, de tous les juifs actuellement internés dans mon département, j’ai l'honneur de vous faire connaître que, compte tenu de l’accord téléphonique des Services de M. Leguay, en date du 24 août 1942, il a été déféré à la demande de la Police Allemande de Sûreté et que l’opération s’effectue aujourd’hui 26 août 1942, dans les conditions suivantes :
A la suite d’un examen sommaire effectué dans les camps d’internement, par l’Autorité Allemande, en présence de mon représentant, quelques personnes ont été exemptées de la mesure, savoir : les mères de famille allaitant un enfant, ainsi que leur bébé : 20 personnes environ, et 10 Juifs accusés d’une infraction dont la matérialité n’a pu être établie.
Aux résultats de ce triage, 463 personnes, parmi lesquelles 186 Français, doivent être transférées au camp de Drancy. Les intéressés sont de tous âges et de toutes nationalités.
Parmi eux figurent, en outre, des veuves de guerre, des femmes de prisonniers, des vieillards ainsi que des conjoints d’aryens.
Pour vous permettre d’intervenir, ainsi qu’il en a été (1) convenu au cours de la communication téléphonique précitée, un chargé de mission se rendra dès demain à Paris, pour vous remettre les listes des juifs transférés et vous signaler, à toutes fins utiles, les cas les plus intéressants.
Le Préfet Régional.
(1) Ce début du paragraphe a été écrit de la main de Maurice Papon, Secrétaire Général de la Préfecture et remplace : Ainsi ai-je l’honneur de vous prier de vouloir bien user de votre autorité afin que les situations particulières soient examinées à Drancy, ainsi qu’il...(note dans la livre de Serge Klarsfeld)
Remarques : Le texte ci-dessus est repris du livre de Serge Klarsfeld, et la note ci-dessus est de lui, mais elle est fausse.
En fait, la rédaction de cette note était de Pierre Garat, qui l'a présentée au Préfet Sabatier, lequel, par une remarque dans la marge du brouillon (on disait la minute à l'époque), a demandé la modification que Serge Klarsfeld attribut à Monsieur Papon. Le Préfet s'est borné a supprimer une formule de politesse qui n'avait pas lieu d'être dans un texte administratif. Ensuite, la note retapée a été signée par Monsieur Papon. L'information 186 Français est soulignée dans la minute et le texte définitif. Tout ceci a été très finement analysé à la deuxième audition de Monsieur Papon par le jury d'honneur.