Jacques Villette :

Pour la réhabilitation de Maurice Papon


Présentation détaillée de l’organisation allemande

    L’organisation des forces d'occupation allemandes en France a varié dans le temps.

     C'est la Wehrmacht qui, sous l'autorité de Hitler, impose  la convention d'Armistice est chargée d'administrer la France occupée. L'entrée en guerre de l'URSS puis celle des USA, et la décision d'Hitler d'exterminer les juifs, poussent Hitler à modifier l'organisation de l’occupation et à la durcir. La sécurité des forces allemandes en France, la lutte contre la Résistance, la répression et la déportation des juifs sont alors confiées à la SS. La Wehrmacht reste alors cantonnée dans le pillage officiel de la France et le maintien de l’industrie française au service de l’armement allemand.

    En 1940, la Wehrmacht signe la convention d’Armistice, et ensuite le MBF, Militärbefehlshaber in Frankreich, Commandement militaire en France, assure le maintien en sujétion de la France.

    Le MBF institue des Kommandanturs dans les régions. Celles-ci sont généralement commandées par des généraux de brigade qui disposent de la Feldgendarmerie. Deux autres organismes sont impliqués :
    - La commission d’Armistice, qui se tient à Wiesbaden, qui a pour objet de préciser les modalités d’application de la convention d’Armistice.
    - Abetz, dont l’équipe est très réduite, est le représentant de Ribbentrop auprès de Vichy.

    Les exécutions d’otages d'octobre 1941, à la suite des attentats communistes, furent ordonnées par le MBF, sur ordre express de Hitler qui haïssait la France autant que les juifs. La SS commença à s’implanter discrètement en France en 1940 et commença des actions de propagande. Ensuite, des antennes des services SIPO-SD furent créées à Angers, Dijon et Bordeaux. 

    A Bordeaux, dès 1940, de nombreux organismes de renseignement s’implantèrent très rapidement à cause de la position géographique du port qui en faisait le seul port de haute mer du Reich à l’abri des bombardements alliés. Le port était devenu stratégique pour l’approvisionnement de produits nécessaires à l’industrie d’armement, et la base arrière de la guerre sous-marine dans l’Atlantique.

    Au printemps 1942, après que fut prise la décision d’exterminer les juifs, l’organisation fut profondément modifiée et toutes les responsabilités de renseignement, de police, de répression et de déportation des juifs   furent confiées à la SS et au RSHA, Reichsicherheitshauptamt, Office central de sécurité du Reich, sous les ordres de Heydrich (puis de Kaltenbrünner après juin 42). Oberg fut intronisé comme HSS-PF, chef suprême des SS et chef des polices, par Heydrich, conformément à la note de service de Hitler qui définissait la répartition des responsabilités entre lui et le MBF. Il commandait la police d’intervention, l’Ordnung Polizei, et la représentation en France du RSHA, qui était le BdS, Befehlshaber der Sicherheitspolizei, placé sous les ordres de Helmut Knochen.

    Au sein du RSHA était hébergée la GESTAPO qui, sous les ordres de Müller à Berlin, prit en charge toutes les tâches de répression et l’extermination des juifs.

    Le BdS avait une délégation dans chaque région, le KDS, Kommando der SIPO-SD, qui hébergeait un spécialiste de la déportation des juifs (17 KDS en zone occupée).

    Il faut donc distinguer l’organisation réelle de l’organisation apparente.

    L’apparente était :
    La Gestapo était sous les ordres du BdS, ce BdS sous ceux de Oberg, et Oberg sous ceux de von Stülpnagel.

    La réelle était :
    Oberg, HSS-PF, rapportait directement à Himmler pour tout ce qui concernait la sûreté du Reich, c’est à dire la répression de toutes actions contre le Reich, le renseignement et le contre-espionnage.
    La Gestapo était sous les ordres de Müller, et en particulier, la déportation des juifs était sous la responsabilité de l’un de ses adjoints, Adolf Eichmann, qui avait ses correspondants au BdS et dans tous les KDS.

Le REICHSFÜHRER SS Himmler commande toutes les organisations SS, la Police en Uniforme (Ordnung Polizei), et le RSHA

 

RSHA

Heydrich, puis Kaltenbrünner

Autres agences

Agence IV

Gestapo

Heinrich Müller

IV-J (juifs)

Eichmann1

Agence V

Kripo

Arthur Nebe

Agence VI

SD-Etranger

Walter Schellenberg

 

L’organisation à Paris est une transposition de celle au niveau de Berlin. Oberg commande l’Ordnung Polizei en France et le BdS. Il a pour adjoint Hagen, qui commandait, avant la réorganisation, la représentation des SS à Bordeaux, où, entre autres actions, il avait créé le camp de Mérignac Beau Désert. Hagen devient alors impliqué dans la désignation des otages à fusiller . Le BdS, qui est l’ensemble SIPO + SD, est sous les ordres de Knochen.

 

BdS = SIPO + SD

Helmut Knochen2

Autres sections

Section III

SD 

Lischka3

Section IV

Gestapo

Karl Boemelburg

IV J (juifs) :

Danneker, puis Röthke

Section V

Kripo

Hagen

Organisation à Bordeaux

    Avant la création du KDS, le détachement du SIPO-SD de Bordeaux est commandé, jusqu’en avril 1942, par Hagen qui met en place le fichier juif, crée le camp de Mérignac et organise les premières déportations avant l’arrivée de M. Maurice Papon.

    A la création du KDS, l’organisation est le reflet de l’organisation au niveau de Paris :

    D’une part, l’Oberfeld Kommandantur, commandée par le général Knoertzer, et dont le sécrétaire général est Herbold, prend en charge l’organisation de l’occupation armée, et les actions visant à exploiter au maximum tout ce qui peut être utile à l’armée allemande : réquisition de biens, réquisition des travailleurs et utilisation de la production industrielle.

    D’autre part, le KDS, Kommando der SIPO-SD, contrôle toutes les actions de police.

KDS

Luther, puis Machule

Autres sections

Doberschutz

puis Nährich 

(note 5)

Section III

SD

Dornheim

puis Nährih

Section IV

Gestapo

Dohse

IV-J (juifs)

(note 5)

Section V

Kripo

Zurer et Dohse

    Doberschutz est en relation constante avec Dannecker, puis Röthke, qui  en référe directement à Eichmann.
    Dohse est en relation constante avec Boemelburg4, mais ils s'est toujours défendu d'avoir été impliqué dans les décisions de représailles. 

    Autres services d’espionnage allemand à Bordeaux :
    Nebenstelle : Centre de renseignement de l’Abwehr.
    GFP, Geheime Feld-Polizei, 65 agents qui furent intégrés au SIPO-SD.
    Kommando Koch (70 agents) Surveillance de la frontière espagnole.
    Police maritime et côtière.
    Deviensentelle, contrôle de devises.
    Ordnungspolizei : en charge de la surveillance de la police française.

Notes :
    1 - Jäckel expose dans son livre que Eichmann était de la même promotion que Knochen dans l’école supérieure de formation des cadres de la SS. Knochen était sorti major, et Eichmann dernier. Eichmann évitait de rencontrer Knochen lorsqu’il venait à Paris, car il nourrissait un complexe d’infériorité et il savait que Knochen désapprouvait les déportations de juifs. Les témoins du procès de Jérusalem ont été frappés de la faiblesse intellectuelle d’Eichmann.
    2 - Knochen rendait compte de ses activités à Walter Schellenberg à Berlin et au colonel puis général Hans Speidel en France. Schellenberg fut condamné à 6 ans de prison et fut libéré en 1951, et Hans Speidel eut une très brillante carrière dans l’OTAN, pendant que Knochen se morfondait pendant 17 ans dans les prisons françaises.
    3 - Lischka fut aussi chef du KDS de la région parisienne. Lui et Hagen, poursuivis par Serge et Beate Klarsfeld, furent condamnés à 10 ans de prison en 1981 par un tribunal de Cologne.
    4 - Une note de service de Boemelburg précise la façon de traiter les prisonniers expiatoires, et montre bien qu’il avait la responsabilité des représailles.
    5 - Par manque de personnel, l'organigramme du KDS de Bordeaux était spécifique. Les fonctions de la section IV -J , contrôle des juifs, était remplies par le lieutenant Doberschutz, puis par le capitaine Nährich.  Ce dernier cumulait d'autres fonctions : adjoint du capitaine Luther (puis du commandant Machule), et commandant de sections II, III, et VI.  Dohse, qui était adjudant, puis sous-lieutenant,  n'a jamais été impliqué dans la déportation des juifs. Le 5 mai 1953, Luther a été condamné à 5 ans de réclusion et Dohse à 7 ans de travaux forcés ; ils furent donc libérés sur le champs étant prisonniers depuis plus longtemps.

Accueil    Sa défense    Le procès    Bordeaux   Qui est-il ?   Bibliographie